Industry research for large-scale sustainability
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01.07.23

Suivre la science dans la culture des plantes aussi

Chère lectrice, cher lecteur,

Toutes les sélections végétales modifient génétiquement les plantes. Nos cultures sont le résultat d’interventions humaines dans le génome des végétaux. Au départ, ce sont des croisements ciblés qui ont permis à l'homme d'améliorer les plantes. Un processus lent et fastidieux, qui a connu une accélération dès les années 1930 grâce à de nouvelles méthodes de sélection, comme la mutagénèse. La mutagénèse consiste à provoquer des mutations dans le génome des plantes à l’aide soit de produits chimiques, soit de rayonnements ionisants. Ensuite, les mutants obtenus sont recherchés pour trouver des gènes intéressants ou les propriétés souhaitées. Dans l’affirmative, elles sont croisées avec des variétés existantes. La mutagénèse est un procédé aléatoire qui produit beaucoup de rebus. Elle est inefficace et chronophage. Cette méthode de sélection non ciblée est aussi utilisée dans l’agriculture biologique.

Ce qu’il faut comprendre, en revanche : dans le bio aussi, on cultive des variétés de légumes avec un génome modifié. Qu’ils soient bio ou issus de l’agriculture conventionnelle, ces légumes possèdent des propriétés organoleptiques qui flattent l’œil et le palais. Ils peuvent, par exemple, être dépourvus d’amertume. Par sélection, on leur a ôté le goût amer. C’est dans la nature des choses : une sélection n’est, en soi, pas naturelle. L’être humain adapte les plantes cultivées à ses besoins depuis qu’il est devenu sédentaire. Cette vérité peut sembler amère pour celles et ceux qui croient encore qu’en mangeant des légumes familiers, c’est la nature à l’état pur qui se trouve dans leur assiette.

Lors des interventions aléatoires dans le génome des plantes, les cultivateurs tentent leur chance jusqu’à obtenir les résultats recherchés. Ils s’en remettent au hasard. C’est tout l’inverse avec les méthodes modernes de sélection végétale qui, elles, sont ciblées. En faisant appel aux ciseaux moléculaires CRISPR/Cas ou à d’autres procédés de l’édition génomique, elles permettent d’intervenir précisément dans le génome. Nous avons expliqué la procédure dans le glossaire qui est disponible sur swiss-food.ch. Les avantages coulent de source : la sélection de précision permet de rendre les plantes plus robustes.

L’Académie suisse des sciences naturelles (SCNAT) a publié il y a peu une brochure qui présente des exemples concrets d’application des ciseaux moléculaires dans l’agriculture en Suisse. On ne peut qu’en recommander la lecture. Avec l’édition génomique, on peut rendre la vigne résistante au mildiou et à l’oïdium. Ou rendre le pommier résistant au feu bactérien, qui ravage les vergers, désensibiliser les tomates à certains virus ou encore améliorer la résistance de la pomme de terre au mildiou. Des sélections ciblées empêchent la perte de nourriture dans les champs et réduisent le recours aux produits phytosanitaires. Des exemples convaincants qui sont présentés sous forme résumée sur swiss-food.ch.

L’édition génomique avec des gènes propres à l’espèce ne diffère pas de la sélection traditionnelle. Comme cette technique est plus précise, l’apparition de mutations indésirables est toutefois moins fréquente. Dans la communauté scientifique, il est ainsi largement admis que l’édition génomique ne devrait pas être réglementée différemment des méthodes de sélection traditionnelles. Ceux qui appellent à suivre la science dans le débat sur le changement climatique ne doivent pas passer sous silence le large consensus scientifique au sujet des méthodes de sélection végétale. Les opposants sont à court d’arguments. Ils ignorent la science et se contentent de rebâcher de vieilles prophéties de malheur.

Il y a encore plus choquant. L’organisation environnementale allemande «Aurelia» reconnaît ouvertement le conflit avec la science dans un document stratégique interne, comme le relate le «Welt am Sonntag». Les auteurs de ce document écrivent que pour les arguments à dominante scientifique, l’association ne peut être que perdante, car elle n’a aucun argument à opposer aux scientifiques qui demandent de suivre la science. Les écologistes en concluent qu’il leur faut un nouveau narratif en ce qui concerne l’utilisation de la technologie génétique dans la sélection végétale. Ce nouveau narratif ne se fonderait pas sur des faits, mais sur des émotions telles que la liberté de choix, l’amour de la nature (abeilles) et la toute-puissance des semenciers. Le combat non scientifique de Greenpeace contre le Golden Rice appartient au même chapitre. Chaque jour, le riz doré pourrait sauver des vies d’enfants dans les pays en développement. Depuis des années pourtant, Greenpeace se bat contre la culture de ce riz. Ce combat est mené actuellement aux Philippines. Il est à la fois insensé et fatal.

Le consensus scientifique fait néanmoins son chemin en politique. Depuis mars 2023, la Grande-Bretagne autorise la culture des plantes obtenues par édition génomique. Autrement dit, les agriculteurs britanniques ont le droit de cultiver des plantes capables de résister aux effets du changement climatique, aux maladies et aux parasites. Ce changement de cap sert aussi bien le développement durable que la production régionale. Il insuffle également un nouvel élan à la recherche en Grande-Bretagne.

Selon toute vraisemblance, l’UE aussi donnera bientôt son feu vert à l'édition du génome. Comme l’écrit la «Frankfurter Allgemeine Zeitung» (FAZ), l’UE pave la voie à la technique des ciseaux moléculaires. Selon le projet de l’Union européenne, les plantes sélectionnées par édition génomique et les sélections traditionnelles seront à l’avenir soumises à la même réglementation. La Commission européenne prévoit de présenter au début de juillet un projet de réglementation sur les nouvelles techniques de sélection. Avant de pouvoir être mise en œuvre, la directive doit toutefois être adoptée par le Conseil européen des 27 États membres et par le Parlement européen.

Jusqu’à ce jour, tant l’UE que la Suisse se sont montrées très restrictives. Du point de vue scientifique, cette position restrictive n’est plus guère défendable. Comme le déclare Matthias Berninger, responsable Durabilité chez Bayer, dans les colonnes de la «Frankfurter Allgemeine Zeitung», une sélection accélérée de nouvelles variétés est urgemment nécessaire : «Nous devons mettre le turbo si nous voulons suivre le rythme du changement climatique», déclare-t-il. Il s’interroge: «Qui sera responsable des risques pour la sécurité alimentaire si nous laissons en jachère le potentiel de cette nouvelle technologie?»

C’est une question légitime et la réponse ne fait aucun doute pour Bettina Stark-Watzinger, la ministre allemande de la recherche. À son avis, le recours aux nouvelles techniques de sélection est indispensable. Il s’agit de garantir l’alimentation et d’adapter l’agriculture au changement climatique. De plus, l’édition génomique boostera l’innovation en Allemagne. La ministre estime qu’il serait trop risqué de ne pas utiliser la nouvelle technologie. Les institutions scientifiques autrichiennes appellent également à «évaluer les nouvelles méthodes de sélection sans préjugés, avec un esprit ouvert et sur la base de preuves scientifiques».

La sélection de précision au moyen des ciseaux moléculaires séduit en politique. En Suisse aussi, le Conseil national et le Conseil des États ont demandé au Conseil fédéral d’élaborer un projet de loi jusqu’en 2024. Les plantes obtenues avec les nouvelles technologies de sélection, tels les ciseaux moléculaires CRISPR/Cas, et sans matériel génétique étranger, ne devraient plus tomber sous le coup du moratoire sur le génie génétique. S’exprimant face à ses collègues, le député UDC au Conseil des États Hannes Germann a déclaré : « Ces nouvelles méthodes permettront de réagir aux défis du changement climatique. » Le but est de mettre sur le même plan les plantes obtenues par édition génomique sans matériel génétique étranger et les plantes obtenues par la sélection traditionnelle. De fait, ces plantes ne peuvent pas être distinguées. Pour cette raison, les traiter différemment dans la législation n’a pas de sens. Car aujourd'hui, on ne vante pas non plus le fait que les plantes (bio) ont été cultivées à l'aide d'un traitement chimique ou radioactif.

Comme dans la communauté scientifique, le consensus selon lequel il n’est pas justifié d’avoir peur des plantes obtenues par les nouvelles méthodes de sélection s’impose peu à peu aussi dans les médias. La responsable du pôle «Science» de Tamedia, Anke Fossgreen, qualifie les nouvelles méthodes de sélection de «douces et élégantes», au contraire des méthodes de sélection traditionnelle qui mise sur les produits chimiques et les rayonnements ionisants. Il est décevant, écrit-elle, que les agriculteurs bio ignorent les avancées de la recherche. De fait, Bio Suisse ne veut toujours rien savoir des nouvelles techniques de sélection, alors que le pionnier du bio Urs Niggli, par exemple, se prononce depuis longtemps en faveur de la sélection de précision.

Le célèbre journaliste agricole Jürg Vollmer voudrait lui aussi que l’on autorise les ciseaux moléculaires. Il décrit l’édition génomique moderne comme la suite logique des mutations et de la mutagénèse dans la sélection végétale. Il est important de le rappeler: en tant qu’organisation de marketing, Bio Suisse est libre de renoncer aux avantages des nouvelles méthodes de sélection tant que ses partenaires contractuels la suivent sur cette voie. Mais il est choquant d’estimer que ce choix doit aussi être valable pour les autres agriculteurs (bien plus nombreux). Lorsqu’une plante obtenue par édition génomique ne contient pas de matériel génétique étranger et qu’elle aurait pu apparaître par hasard dans la nature, cette plante sera considérée comme une plante obtenue par sélection classique. Des différences fondamentales au sujet de la sécurité des plantes n'existent pas. Le phytologue Bruno Studer de l’EFPZ affirmait déjà dans un entretien paru en 2020 : « Si la Suisse devait ne pas suivre le mouvement, des solutions innovantes seraient élaborées et transposées sous d’autres cieux. À long terme, nous nous priverions d’un outil intéressant pour relever les énormes défis de demain. Et nous manquerions une occasion de rendre l’agriculture plus durable.»

Mais le Conseil fédéral prend son temps, comme le montre sa réponse décevante à une question parlementaire lors de la session d'été.

La lenteur n’est cependant d’aucun recours, car les défis dans l’agriculture sont immenses. À une époque où l’agriculture devient une activité toujours plus exigeante du fait des caprices du temps, de la disparition de moyens de production, de la raréfaction des biens, de la hausse des prix de l’alimentation et de l’évolution vers des systèmes agroalimentaires plus durables, il faudrait agir plus vive et non plus lentement. L’agriculture a besoin de variétés innovantes et climatiquement résilientes dans sa boîte à outils. Comme l’écrit Matthias Benz dans la «NZZ»: « Les nouvelles technologies sont une clé importante pour rendre l’alimentation plus respectueuse de l’environnement.» Il invite la Suisse et l'UE à prendre une tranche de l'ouverture d'esprit des Américains et à moins se baser sur le principe de précaution qui se transforme de plus en plus en principe d'interdiction. Et il conclut : «Ces dernières années, la production alimentaire est devenue l'un des secteurs les plus intéressants sur le plan technologique. Il est grand temps pour l'Europe d'exploiter ce potentiel.»

La rédaction de swiss-food

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