La gestion des risques est préférable à la paralysie

La gestion des risques est préférable à la paralysie

L’Europe n’est pas fortiche en gestion des risques. Au lieu de mettre en balance les avantages et les risques des nouvelles technologies, elle s’en tient par réflexe au principe de précaution. Or, la peur du risque conduit, tôt ou tard, à la paralysie. Le principe de précaution se transforme en principe d’évitement.

mercredi 14 avril 2021

L'essentiel en bref

  • Dans le même temps, les progrès technologiques rapides génèrent de nouveaux risques.
  • Les avantages et les inconvénients des nouvelles technologies doivent être soigneusement pesés.
  • Au lieu d’un principe de précaution strict, les risques de non-application devraient être davantage pris en compte.

Dans l’édition de samedi de la «Neue Zürcher Zeitung», Sven Titz critique dans son éditorial notre attitude face aux risques. La pandémie de coronavirus en offre un parfait exemple. Trois faiblesses sont relevées par l’auteur: «Lorsque des menaces nouvelles ou rares apparaissent, l’Europe réagit avec beaucoup trop d’inflexibilité. Elle se montre ensuite incapable de soupeser les risques entre eux et, enfin, sa communication est insuffisante.» Le monde moderne est exposé à de multiples menaces latentes. La recherche et le développement de nouvelles technologies avancent à un rythme soutenu, de sorte qu’une gestion adéquate des risques prend toujours plus d’importance.


Les risques et les coûts d’une non-utilisation sont aussi à considérer

En matière de gestion des risques, M. Titz relève que les pays anglo-saxons et l’Europe continentale sont complétement différents. Alors que le principe de précaution est de mise en Europe depuis les années 1970, le rapport coût-utilité l’emporte en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne. Selon le principe de précaution, les risques liés aux nouvelles technologies (même si l’on ne sait que peu de choses sur leurs possibles dommages) sont à éviter. Une technique ne doit pas être utilisée tant que de possibles effets négatifs sur l’être humain ou l’environnement ne peuvent pas être exclus. Le but est d’éviter les risques le plus possible. L’analyse coût-utilité, en revanche, englobe non seulement les possibles effets négatifs d’une nouvelle technologie, mais aussi les coûts d’une non-utilisation. Car bloquer de nouvelles possibilités techniques comporte également des risques. L’autorisation des vaccins contre le SARS-CoV-2 en est le dernier exemple en date: les effets secondaires isolés sont-ils plus dangereux que le virus lui-même? Autre exemple: celui de l’homologation de nouveaux produits phytosanitaires: durant ces dernières années, aucun nouveau pesticide n’a été autorisé en Suisse. Plus de 200 substances actives sont en attente d’une décision. Cet attentisme comporte des risques pour la sécurité alimentaire et l’environnement. Car les nouvelles substances actives sont en général plus ciblées et plus sûres.


Transparence dans l’information

Poursuivant sa démonstration, M. Titz souligne que l’Europe a de la peine non seulement à gérer les risques, mais aussi à informer sur les risques. Très souvent, les chiffres sont publiés tels quels, sans être mis en regard avec des valeurs de référence correspondantes. Lorsqu’un journaliste écrit que la consommation d’un aliment augmente le risque de cancer ne semble pas rassurant de prime abord. Lorsqu’il s’avère que le risque de maladie est d’un millionième, la multiplication du risque par deux se voit sous une lumière différente. Il est urgent de faire la différence entre ce qui semble dangereux et ce qui l’est effectivement. M. Titz en tire les conclusions suivantes: les risques et les probabilités devraient se voir accorder une plus grande place à l’école déjà. Et les décideurs dans l’économie, la politique et l’administration devraient se préoccuper davantage de la gestion des risques.

Le principe de précaution devrait s’accompagner plus souvent d’une analyse coût-utilité. Ceux qui répondent à un risque en formulant des interdictions ou en prônant la tolérance zéro finissent un jour ou l’autre par rester à quai.

L’exemple du chlorothalonil
Il est également urgent d’informer de manière plus transparente sur les risques. L’exemple du chlorothalonil en est la preuve: contre leurs propres conclusions scientifiques, les autorités ont qualifié de «pertinents», et dont de potentiellement dangereux pour la santé et l’environnement, tous les produits de dégradation de ce fongicide. Pratiquement du jour au lendemain, la valeur-seuil a été abaissée d’un facteur 100. Ce produit phytosanitaire est interdit depuis le 1er janvier 2020. Par ce virage à 180 degrés, la Confédération a créé la panique chez les distributeurs d’eau qui doivent à présent respecter les nouvelles valeurs-seuils à coup de millions d’investissements, alors qu’il n’y a aucun risque de mise en danger de la santé de la population. Est-ce cela, une bonne gestion des risques?

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